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Le vaste plateau calcaire constitué par le revers des Côtes de Moselle s’allonge du nord au sud sur toute la longueur du département. Il comprend le Pays-Haut, au nord (voir l’unité de paysage n°2), et le plateau de Haye, au sud. Ces deux unités de paysage sont séparées par la vallée du Rupt-de-Mad. L’unité de paysage du plateau de Haye est limitée à l’est par le front des Côtes de Moselle et à l’ouest par la plaine de la Woëvre. Contrairement au Pays-Haut, largement ouvert, le plateau de Haye apparaît plutôt boisé, son nom faisant directement référence à cette caractéristique (il dériverait du mot germanique « hag » ou « haia » qui signifie forêt). Les espaces agricoles se concentrent sous forme de clairières taillées dans les forêts de hêtres. Les cours d’eau qui ont creusé les calcaires du Bajocien (Rupt-de-Mad, Esch, Moselle), dessinent des vallées encaissées, aux ambiances intimes, étonnamment déconnectées du plateau. Ces vallées présentent des paysages patrimoniaux remarquables qui font l’objet d’une sous-unité de paysage : « Les vallées encaissées du plateau de Haye », et d’une unité de paysage : « Les Boucles de la Moselle ». Quelques villages se sont installés au centre des clairières cultivées tels que Saizerais, Velaine-en-Haye, Rosières-en-Haye, Viéville-en-Haye, … Ainsi morcelée par les vallées qui découpent le plateau, l’unité de paysage s’allonge ainsi sur 65 km de long pour 10 à 15 km de large environ.
« Mais quand il se retournait et qu’il contemplait la plaine étalée devant lui, son âme était chaque fois traversée d’étonnement. Un pays nouveau se révélait là, brusquement, comme si on avait ouvert une porte. C’était grand et beau, d’une beauté qui vous serrait le cœur. La plaine s’étendait à perte de vue, jusque vers Allain et Colombey, déroulant l’ondulation des terres argileuses. La flèche d’un clocher, montant d’un pli du sol, révélait la place des villages blottis au creux de la plaine. Des routes fuyaient à l’horizon, alignant leurs rangées de peupliers, dont les cimes s’enfonçait parfois dans les vallons. Et dans toute cette étendue, on ne voyait que la fuite des labours profonds, des sillons de terre brune et par endroits des friches couvertes d’une herbe jaunâtre. »
Emile Moselly, Terres lorraines (1907)
Le plateau de Haye, forêts et défrichement
Les paysages actuels du plateau de Haye reflètent la position à l’écart des axes de développement de ce territoire, situé entre le couloir mosellan (qui concentre dès l’époque gallo-romaine l’essentiel de l’occupation humaine : agriculture, viticulture et commerce), et l’évêché de Toul (qui occupe une position centrale dans la province du sud de la Lorraine). Le plateau de Haye reste ainsi peu exploité et couvert de forêts. Au Moyen-Age, une vague de défrichement ouvre de grandes clairières sur le plateau afin de développer la polyculture. Parallèlement, les forêts connaissent une phase d’exploitation, le bois servant à alimenter les industries de la vallée : faïenceries, tuileries et artisanat du fer. Dès le XVIe siècle, les ducs de Lorraine réglementent l’exploitation du bois afin de préserver les chasses et de garantir la pérennité de la ressource en bois : c’est la naissance de la grande forêt de Haye. Jusqu’au XIXe siècle, les besoins en bois des manufactures généralisent le taillis-sous-futaie. Puis, à partir de la moitié du XIXe siècle, le coke remplace le bois dans les hauts-fourneaux ; la futaie est alors privilégiée afin de constituer des réserves en bois d’œuvre. Au XXe siècle, la Première Guerre mondiale laisse des séquelles dans les paysages avec la constitution de boisements de résineux sur les « zones rouges » dévastées par les conflits et la destruction de villages entiers : Régniéville, Remenauville, Fey-en-Haye. Plus récemment, la tempête du 26 décembre 1999 a fortement touché la forêt, marquant aujourd’hui encore les paysages.
Un relief de plateau entaillé de profondes vallées
Le château de Pierrefort surplombe la vallée de l’Esch qui entaille le plateau de Haye - Manonville
Une rupture forte entre paysages des plateaux ouverts offrant des horizons lointains, et paysages des vallées intimes cadrées de coteaux
Paysage agricole tiré à l'horizontale sur le plateau – Aingeray
Une clairière agricole sur le plateau offrant un panorama sur les horizons des Côtes de Meuse – Colombey-les-Belles
Paysage ouvert sur le plateau offrant un large panorama sur la Woëvre et les horizons boisés des Côtes de Meuse – Villey-le-Sec
Un plateau couvert de vastes massifs forestiers et de « clairières » agricoles
Traversée de massifs boisés créant un effet de 'porte' entre deux clairières agricoles
Une clairière agricole sur le plateau au-dessus de Selaincourt offrant un panorama sur le Saintois
Des paysages agricoles de grandes cultures sur le plateau, par endroits simplifiés
Paysage simplifié par des grandes cultures sur le plateau : grandes parcelles de céréales, structures végétales rares - Limey-Remenauville
Parcelles de colza sur le plateau – Flirey
Paysage très ouvert de grandes cultures avec les horizons boisés de la forêt de Haye au loin – Sexey-les-Bois
Un habitat groupé en villages compacts installés au milieu des clairières agricoles
La silhouette du village anime les paysages horizontaux du plateau - Limey-Remenauville
Dans le village-rue lorrain, les constructions sont alignées de part et d'autre d'une rue principale élargie d'usoirs qui servaient autrefois à entreposer les tas de fumier et le matériel agricole. Ici, les usoirs sont plantés et l'architecture est caractéristique de la reconstruction : linteaux métalliques des portes de granges, constructions alignées mais non jointives, ...) - Limey-Remenauville
Village-rue lorrain : maisons jointives, usoirs – Flirey
Le village enveloppé dans sa ceinture végétale de prés-vergers est installé au milieu d’une clairière agricole entourée par le massif boisé de la forêt de Haye – Velaine-en-Haye
Composition caractéristique d'un paysage du plateau de Haye
Des sites bâtis précisément positionnés et organisés dans leurs finage : un village du plateau de Haye installé au centre d’une clairière agricole
La Forêt de Haye : une forêt aux usages périurbains de loisirs au droit de Nancy
Chemin de promenade sur le rebord du plateau de Haye (Dieulouard)
Des paysages qui gardent témoignage des guerres : villages détruits, ’zone rouge’ forestière
Le village de Remenauville entièrement détruit durant la Première Guerre mondiale - Limey-Remenauville
Les forêts de résineux (pins et épicéas) sont les traces de la Première Guerre mondiale. Elles ont été plantées sur les terrains bouleversés (« zone rouge ») par les combats de 1914-1918 entre Thiaucourt et Dieulouard.
Une pression urbaine importante due à la proximité de Nancy et à la présence d’infrastructures routières majeures telles que l’A33 et l’A31
Quartier en construction dans l’espace agricole – Velaine-en-Haye
Cette unité paysagère, comprise dans le périmètre du Parc naturel régional de Lorraine, se caractérise par sa surface boisée, entrecoupée d’espaces agricoles. Les boisements forment une continuité Nord/Sud sur les plateaux, entaillés à deux endroits par les boucles de la Moselle orientées Est/Ouest. Ce corridor forestier est fragmenté par les voies de chemin de fer, par la LGV-Est et par l’A31, représentant un trafic routier très important. La partie Sud (vers Colombey-les-Belles) plus boisée et moins fragmentée est plus fonctionnelle. Dans la partie Nord, les boisement sont plus découpés et subissent de fortes pressions foncières.
Les massifs forestiers abritent des écosystèmes particuliers : les vallons froids. Ils se cantonnent dans les entailles profondes des Côtes de Moselle et proches de la Moselle ou de la Meurthe, où les conditions climatiques sont plus sévères. Les plus remarquables sont le site du vallon d’Arrot (APB, Natura 2000 et ENS), le vallon de Bellefontaine (ENS et ZNIEFF1) et le fond de Monvaux (Natura 2000, ENS et ZNIEFF1). Ces sites accueillent des plantes à floraison printanière remarquables telles que la Gagée jaune ou la Nivéole printanière, ainsi que des espèces montagnardes comme l’Aconit tue-loup. Le vallon de Bellefontaine, à cheval avec l’unité paysagère de Nancy et sa couronne, est par exemple constitué d’une mosaïque de milieux (ruisseau rejoignant la Meurthe, deux étangs, zones humides, prairies, pelouses calcaires, boisement), abritant une nature riche et diversifiée étroitement liée à l’eau, dont la Mouche scorpion, la Gagée jaune et l’une des plus grandes populations d’amphibiens du département.
Atouts :
Les forêts : un intérêt écologique, des usages de productions (bois) et de loisirs, un contraste fort avec les clairières agricoles animant le paysage
Taillis de charmes sous futaie de hêtres - Bois de Selaincourt
Traversée forestière entre deux clairières agricoles
Les villages et leur patrimoine : un habitat groupé et compact bien lisible dans le paysage
Le château médiéval de Manonville
Les ceintures végétales de prés-vergers, jardins et prairies : une transition douce entre le village et les espaces de grandes cultures
Prés-vergers enveloppant le village et créant un paysage accueillant et confortable en transition avec les grandes cultures - Sexey-les-Bois
Alignements d’arbres valorisant l’entrée du village - Flirey
Les points de vue : des panoramas remarquables sur les vallées et la Woëvre
Ouverture visuelle sur la Woëvre et les Côtes de Meuse boisées à l'ouest - Vue depuis la RD28
Panorama sur la Woëvre et les buttes-témoins autour de Toul – Vue depuis le fort de Villey-le-Sec
Fragilités :
La fragilisation et le morcellement du massif forestier par les infrastructures routières (A33 et A31 notamment) et par de fortes pressions urbaines (habitats et zones d’activités), entraînant des ruptures de continuité écologique
Des phénomènes d’étalement urbain dus à la proximité de Nancy, empiétant sur les espaces agricoles et naturels
Lotissement en cours de construction sur le plateau agricole - Velaine-en-Haye
La consommation des ceintures vertes des villages par les extensions d’urbanisation non maîtrisées et l’installation de bâtiments agricoles
La modernisation de l’activité agricole contraint les exploitations à sortir des centres anciens. La construction de hangars agricoles en limite du village, sans accompagnement végétal pour dévaloriser l’image du village - Lironville
La simplification des paysages agricoles suite à l’intensification des pratiques agricoles et à la suppression de structures végétales
Paysage agricole simplifié sur le plateau : grandes parcelles de céréales, absence de structure végétale – Flirey
La simplification des paysages forestiers et de la biodiversité en « zone rouge » par des plantations monospécifiques de résineux
Paysage artificialisé par les plantations régulières de résineux en « zone rouge » - Villers-sous-Prény
Le vieillissement de centres de villages : espaces publics non valorisés, ruines, …